1. De la famille à la nation
Aussi loin que nous pouvons remonter dans l'histoire personne ne peut contredire que la famille est l'unité de base de l'espèce humaine et d'abord limitée au lien du sang : grands-parents, parents, enfants. Jadis tout le monde vivait plutôt sous un même toit voire des toits différents dans un même lieu pour des raisons de survie. La mixité génétique se fait alors de proche en proche avec les familles voisines qui essaient de vivre en harmonie sur un même territoire. C'est le clan puis la tribu qui aboutit à la création de communautés sédentaires ou nomades dont le seul problème est éventuellement de défendre son territoire face à un groupe belliqueux qui tenterait de les chasser pour en prendre possession et cela sous l'action d'un seul et unique mobile né de la chute : la convoitise. Celle-ci, afin d'être satisfaite, génère la recherche du pouvoir à tout prix et, de l'individu aux communautés les plus grandes, elle est le fléau le plus destructeur de l'homme déchu qui ne croît pas que Dieu est capable de pourvoir pour tout le monde.
Les membres d'une tribu assurent chacun les tâches que son sexe (homme ou femme) et son âge (adultes ou enfants) lui attribuent mais chacun, dans sa catégorie fait la même chose que la tribu voisine. Par exemple tous les hommes adultes mettent en culture les parcelles qu'ils défrichent, construisent leur habitation, leurs outils, leurs armes, creusent des puits, luttent contre les bêtes sauvages ou se battent contre les envahisseurs, etc. La tribu défend un territoire et accompli des tâches pour sa survie mais n'est pas organisée autour d'une logistique qui facilite les spécialisations. Or c'est ce type d'organisation qui libère les individus qui enrichissent alors leurs connaissances par la découverte et l'apprentissage de nouvelles techniques indispensables à une meilleure efficacité collective. Puisque les conflits sont une question de vie ou de mort, la tribu qui libère les hommes des tâches communes afin qu'ils se consacrent uniquement au combat devient vite dominante et conquérante. La tribu qui répartit ainsi les tâches entre ses sujets et organise des liens entre eux tout en facilitant la liberté individuelle autour d'un projet porté par des valeurs communes, devient une communauté collectivement efficace et enviée donc, prospère et puissante. Notez, que beaucoup de nations totalitaires, en négligeant la liberté individuelle et donc la famille, ne font pas rêver !
Ce que je vais suggérer ici choquera sans doute le religieux que vous ne devriez pas être mais je vais le dire quand même : quel que soit le territoire d'influence considéré et malgré des bribes de coopération, les églises locales actuelles ne sont encore qu'une mosaïque de tribus et donc l'Église n'est pas encore une nation. Voilà, ce n'était pas facile à dire mais c'est fait. De quoi se compose alors le paysage chrétien ? D'une multitude de dénominations dont les plus anciennes ont essaimé çà et là sous la forme d'églises locales, toutes étant passionnément animées des meilleures intensions pour faire la volonté de Dieu et ce, dans le respect d'une accumulation de dogmes que chacune d'entre elles cultivent comme autant d'ordonnances divines à accomplir scrupuleusement. Aucun problème pour moi si, comme 99% des chrétiens vous êtes satisfait de cette situation qui vous permet de participer à la vie interne de votre assemblée ou d'accomplir les bonnes œuvres que Dieu a préparé d'avance pour vous. Vraiment pas de problème, continuez à le faire, soutenez votre pasteur si vous en avez un et soyez fidèles. Votre engagement ne peut être que bénéfique à votre propre équilibre et à celui de vos proches ; donc tout est parfait ! Mais, vous vous doutez bien qu'il y a un "mais" quelque part sinon à quoi bon ce discours ? Je ne viens donc pas vous parler de ce que les tribus font pour rester à tout prix des tribus mais de ce que les tribus ne font pas pour favoriser cette nation parmi les nations.
2. D'une structure à une organisation
Structure et organisation sont deux mots si indissociables dans la sémantique actuelle qu'il est très difficile de les distinguer tant le langage courant a pris l'habitude de substituer l'un à l'autre sans vraiment exprimer de nuances. A décharge, il faut bien admettre que les définitions modernes ne font pas beaucoup de différences. Tentons d'y voir plus clair en remontant à l'origine des mots et au moins vous découvrirez les concepts que cette étude affecte à chacun d'eux afin de proposer une vision communautaire différente de celle du passé dans le seul but de créer une nation chrétienne telle que la présente la Bible.
Le sens primitif du mot structure fait exclusivement référence, vers 1500, à une construction, à un bâtiment pour aboutir rapidement à la manière dont celui-ci est bâti. Vers 1554, une structure définit aussi l'arrangement des parties d'un corps vivant puis celui des mots dans une phrase vers 1560. Donc dans cette étude, ce mot désigne la répartition en sous-ensembles des activités de l'église et leur hiérarchisation éventuelle. Une église est structurée parce qu'elle est composée de services (église des enfants, social, maintenance, bureaux, techniques, etc.) et parfois, pour les plus grandes, possède un organigramme complexe. La structure est donc en quelque sorte l'architecture des activités de la communauté.
L'organisation, quant à elle, vient du mot organe, d'abord par le verbe organiser qui signifiait “rendre apte à la vie”. Très vite, ce verbe a pris le sens de “se doter d'une structure” se confondant peu à peu avec la structure, origine de la confusion actuelle. Donc être organisé est devenu “avoir une structure”. Bon d'accord mais pourquoi utiliser deux mots pour parler de la même chose ? En revanche, si on se réfère au sens biologique de chacun des mots, et à mon avis, c'est ici le sens le plus intéressant dans l'image de l’Église en qualité de corps de Christ, nous avons d'un côté une structure qui est une juxtaposition d'organes (ou de parties d'organes) et de l'autre, l'organisation dont le rôle est de rendre ces organes aptes à la vie afin que le corps en bénéficie. Pour continuer sur cette image, l'organisation représente le sang qui apporte la vie aux organes, les nerfs qui participent à la communication entre eux et les hormones qui orchestrent tout le corps. C'est l'organisation qui gère les moyens et les relations de toutes les parties de la structure interne d'une église locale mais qui devrait aussi être mise en place avec les autres structures (églises) dans le cadre de la nation. Voilà qui est de beaucoup plus passionnant car, par définition, et désolé si cela vous choque, une église locale seulement plus ou moins organisée en interne mais pas avec l'Église universelle est inefficace dans le sens où son action sur la transformation du monde qu'elle pourrait apporter, est proche de zéro. La majorité de nos églises, même parmi les plus grandes sont défaillantes sur ce plan avec pour preuve la réponse apportée à la question suivante : quel exemple avez-vous où nos églises en France ont modifié le cours de la nation en 50 ans ? Je me contenterai même si vous me donniez un fait significatif où votre église locale a seulement influencé une décision importante dans votre ville. En général, c'est plutôt des portes qui se ferment au lieu du tapis rouge à la mairie. Pourtant, n'était-ce pas ce que faisaient les églises des premiers siècles au point de devenir si importantes qu'on les a jalousées ?
A quoi mesure-t-on le niveau d'organisation d'une structure ? Tout simplement à son efficacité dans une action par rapport à son équivalent dans l'économie qui elle, est soumise à des notions de rentabilité. "Mais ça ne marche pas votre théorie fumeuse, le social ne se décline pas par des opérations de rentabilité !" Pourquoi, vous pensez que faire du social ça ne coûte rien ? Justement, regardez toutes les économies de la planète et mesurez le coût social du système : ce sont en majorité les moins pauvres qui aident les plus pauvres, pas la spéculations des très riches dont justement le but est l'appauvrissement des populations selon le principe de la loi du plus fort devenu un argument scientifique dans la théorie dite de l’Évolution où Dieu n'existe plus. En tant que chrétien on ne devrait pas être surpris du fonctionnement du système du monde et que la Bible appelle le système de Babylone. Nos églises sont seulement des structures qui soignent les malades du système de Babylone et réparent ses dégâts mais qui ne sont pas organisées pour proposer des alternatives concrètes. La structure permet de répondre ponctuellement à un problème individuel alors que l'organisation permet d'anticiper les besoins par une réponse collective à l'ensemble de tous les problèmes en même temps. Les chrétiens vivent dans le système du monde car aucune congrégation n'a encore mis en place d'alternatives équivalentes. Où est l'épargne des chrétiens ? A la banque de Babylone ! Qui enseigne nos enfants ? L'école de Babylone ? Qui vous emploie ? Qui vous soigne ? Qui produit et vend votre nourriture ? Qui contrôle l'information ? Ne pensez-vous pas qu'il faille inverser l'ordre de nos priorités ? “Oui mais ça va se faire petit à petit et bla bla bla, il y a un temps pour toutes choses” etc. Mais ça fait maintenant deux mille ans que Jésus nous a placé en position de domination et cette domination ne viendra pas sans une organisation interne de l'Église.
En général, chaque église attend qu'un de ces membres se lève, s'investisse et s'épuise seul dans un combat contre le système du monde et je ne parle pas de création d'un commerce à taille humaine mais de structures qu'un chrétien seul ne peut pas initier sauf à être milliardaire ! Non ce n'est pas ainsi que cela peut fonctionner. C'est au corps de s'organiser car une structure collective finit toujours par avoir plus de poids que la somme des individus parce qu'elle ne se fatigue pas et ne se décourage pas facilement contrairement aux individus ! Dans le monde on appelle cela la mutualisation des moyens et c'est très efficace, surtout au niveau de l'influence : regardez les banques, elles sont concurrentes, certes, mais savent très bien s'entendre pour plumer leurs clients ! Je n'invente rien, beaucoup de structure du monde l'utilisent, même la Bible en fait l'éloge sans qu'on sache le voir, mais hélas, nos assemblées accumulent des handicaps tribaux et dogmatiques dignes des pires conflits ethniques ! Toutes les religions se fractionnent en courants qui jadis s'appelaient des sectes et dont l'emploi aujourd'hui est devenu si péjoratif. Certains semblent éluder qu'au temps de Jésus, le judaïsme se composait de pharisiens, de saducéens, de zélotes, d'esséniens, des disciples de Jean-Baptiste et sans doutes bien d'autres lorsque Jésus arrive avec un nouvel enseignement et propose alors ce qui est perçu comme une nouvelle doctrine.
Après que Jésus eut achevé ces discours, la foule fut frappée de sa doctrine car il enseignait comme ayant autorité et non pas comme leurs scribes. (Matthieu 7/29)
Donc cette diversité de sensibilité ne devrait pas nous faire oublier les fondamentaux communs en vue d'atteindre le même but : implanter le Royaume de Dieu sur la Terre en tant que royaume dominant. Or ce n'est pas en restant à l'état de tribus que l'Église y parviendra : les tribus doivent bâtir ensemble les structures communes à une nation comme dans un pays il y existe des compétences à chaque niveau de la structure administrative : par exemple, c'est la nation (l'État) qui s'occupe de l'armée et pas une région ou un département ! Une église locale si grande soit-elle ne peut pas construire un hôpital, une maison de retraite, un supermarché, un centre de loisirs, etc. En 70 ans, les églises évangéliques françaises, toutes dénominations confondues, s'honorent de 500 000 membres environ quand depuis 1960 les bouddhistes sont passés quasiment de zéro à près d'un million et qu'il y a près de 7 millions de musulmans sans parler de toutes les sectes que je ne connais pas. On ne peut pas raisonnablement invoquer ce faux argument qui consiste à prôner un manque d'intérêt pour le spirituel ! Je ne suis pas le premier à constater cet état, Gwen Shaw dans son livre Tribes of israël, (Tribus d'hier et d'aujourd'hui, en français) écrit à la page 169 :
“Il n'y a rien au monde qui puisse diviser les gens comme la religion. C'est le plus grand instrument de division ; il est encore plus puissant que la politique. Voilà pourquoi il existe tant d'églises différentes. Une église dit : «Nous allons nous servir d'instruments». «Pas nous» dit une autre. Et elles se séparent. L'une dit «Nous allons donner la communion dans des coupes individuelles». L'autre répond : «Non! Il faut que tout le monde boive dans le même calice». Et elles se séparent. Une église dit : «Nous allons baptiser au nom du Père, du Fils et du St Esprit». L'autre dit : «Non, nous ne baptiserons qu'au nom de Jésus». Et elles se séparent. La religion provoque de terribles divisions. Je prie pour que vienne bientôt le jour où nous oublierons nos dénominations respectives.” J'ajoute AMEN !
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